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NEPAD - Critique annotee -- Part 5 -- PRIORITES SECTORIELLES
NEPAD - Critique annotee -- Part 5 -- PRIORITES SECTORIELLES
B. PRIORITES SECTORIELLES

B1. Combler l'écart dans le domaine des infrastructures
(i) Tous les secteurs des infrastructures
96. Les infrastructures concernées sont les routes, les autoroutes, les aéroports, les ports maritimes, les chemins de fers, les voies navigables et les installations de télécommunications. Toutefois,
l'accent sera mis uniquement sur les infrastructures à caractère régional ou continental.

Cette emphase sur la dimension régionale et continentale est importante. Nons seulement elle réduira l'extraversion des économies et la concentration des pôles de sortie côtiers, mais elle mettra en réseau des zones intérieures du continent afin de favoriser la circulation des populations, des productions, des services et du capital. L'essentiel des voyages extérieurs des africains se fait en dehors du continent. Il y a lieu donc de favoriser une circulation interne. Il sera important de s'assurer cependant que la priorité soit de privilégier les intérêts de la population avant le capital. Autrement on ne fera que sophistiquer les voies de saignées et de pillage du continent. Les systèmes de communications doivent tenir compte des moyens matériels limités et des conditions tropicales existantes et donc privilégier des options écologiques et peu couteuses. Transport en commun de masse, système adaptés aux exigences du niveau de développement et non pas compétition pour les adapter aux normes existantes dans les pays dits développés. Autrement, on aura pas une extension horizontale des infrastructure , mais la poursuite des formes verticales ne priviléguiant que quelques pôles extravertis et hypertrophiés. À voir la mésaventure de l'unique flotte aérienne continentale, il y a lieu de responsabiliser les Etats sur leurs implications à long terme des dotations en infrastructures de comuncation et de l'entretien qu'ils requièrent.

97. Les infrastructures sont des paramètres essentiels de la croissance économique, ce pourquoi il faut trouver des moyens de placer l'Afrique au même niveau que les pays développés en termes d'accumulation de capital, matériel et humain.

Ceci est bien la crainte que nous soulevions précèdement. Ce même niveau n'est ni possible matériellement , ni souhaitable écologiquement. Des ambitions plus modestes et plus adaptées seraient plus judicieuses. La croissance ne doit pas être la motivation de ces aménagements , mais plutôt le bien être des populations.

98. Si l'Afrique était dotée des mêmes infrastructures de base que les pays développés, elle serait mieux en mesure de se consacrer à la production et à l'amélioration de la productivité pour faire face à la concurrence internationale. Les insuffisances structurelles des infrastructures handicapent sérieusement la croissance économique et la réduction de la pauvreté. Améliorer les infrastructures, y compris le coût et la fiabilité des services, serait dans l'intérêt de l'Afrique comme de la communauté internationale, qui pourrait obtenir des biens et services africains à meilleur marché.

Avec des supposition de cet ordre on peut tout projeter. Les faits sont crus. Cette ambition frénétique à concurrencer la productivité des pays industrialisés est un piège idéologique et un fantasme réel. Les infrastructures doivent renforcer le développement et l'autonomie collective régionale et continentale en tant que vecteurs d'intégration. Il s'agit de les améliorer, pas de doter l'Afrique de ce qui existe dans les centres. Les spécialisations internationales et les routes d'acheminement des produits modernisés ne feront qu'accentuer l'extraversion et la dépendance.

99. Dans de nombreux pays d'Afrique, les colonisateurs n'ont construit d'infrastructures que pour pouvoir exporter les matières premières africaines et importer en Afrique les produits de leurs industries.

Justement c'est bien là la raison de ne pas perpétuer ce paradigme en proposant le point 98 qui s'inscrit dans la même logique néocoloniale.

100. Il convient cependant de reconnaître que pour améliorer les infrastructures africaines, il faudra absolument des financements privés étrangers pour compléter les deux principales méthodes de financement que sont le crédit et l'aide.

101. L'initiative dans le domaine des infrastructures comprend des éléments communs à tous les secteurs ainsi que des éléments spécifiques à chacun d'entre eux.

Non seulement il y a là l'aveu de la dépendance et du retour au système d'endettement, dont le plan se proposait de se passer (3), mais plus grave encore, on augure d'une mise en tutelle des futurs réseaux de communication par le secteur privé.? Les coûs élevés de construction et de mise en valeur de ces infrastructures et la nécessité de ces compagnies d'y trouver un profit imposent de poser certaines questions. Qui aura les moyens de ces routes et ponts à pèages, qui pourra emprunter les compagnies de transport, qui paiera les coûts faramineux de rapatriement des profits en devises fortes de ces compagnies d'infrastructures?

102. Objectifs
Améliorer l'accès aux infrastructures et les rendre plus abordables et fiables à la fois pour les entreprises et
pour les ménages ;
Améliorer la coopération et le commerce au niveau régional grâce à de meilleures connexions transfrontalières des infrastructures ;
Accroître les investissements consacrés aux infrastructures en réduisant les risques auxquels les
investissements privés doivent faire face, en particulier en matière de politiques et de réglementations ;
Edifier des bases de compétences adéquates en technologie et en ingénierie pour installer, exploiter et
entretenir en Afrique des réseaux d'infrastructures " en dur ".

La plupart de ces objectifs demeurent louables. Le problème est leur compatibiltés avec les coûts de fabrication et de remboursement quu viennent donc les hypothéquer. Car faire valoir possiblement qu'il s'agira de prêts et de remboursement à long terme, ne résoud pas l'incapacité matérielle de la plupart des pays africains à en défrayer les coûts , même sur plusieurs générations. Et là, nous n'incluons même pas les coûts d'entretien, de réparation et de rénovation sous des latitudes tropicales.

103. Actions
Avec l'assistance des institutions spécialisées dans chaque secteur, mettre en place des cadres politiques et législatifs pour encourager la concurrence. Dans le même temps, créer de nouveaux cadres de réglementation et consolider la capacité de formation de personnes responsables de la réglementation afin de promouvoir l'harmonisation des politiques et des réglementations pour faciliter les connexions transfrontalières et l'élargissement du marché ;
Accroître les investissements consacrés aux infrastructures, en particulier pour leur rénovation, et améliorer les pratiques d'entretien qui assureront la viabilité des réseaux d'infrastructures ;Commencer à développer des institutions de formation et des réseaux pour encourager la formation de techniciens et d'ingénieurs de haut niveau dans les secteurs des infrastructures ; Promouvoir la participation des communautés et des utilisateurs à la construction, l'entretien et la gestion des infrastructures, en particulier dans les régions urbaines et rurales pauvres, en collaboration avec les Initiatives de gouvernance du NOPADA ; Collaborer avec la Banque africaine de développement et d'autres institutions africaines de financement du développement pour mobiliser un financement durable, en particulier au moyen de processus multilatéraux et des institutions et gouvernements donateurs, afin d'obtenir des dons et des fonds consentis à des conditions de faveur, pour atténuer les risques à moyen terme ; Promouvoir des partenariats entre les secteurs public et privé qui serviront de véhicule pour attirer les investisseurs privés et concentrer le financement public sur les besoins urgents des pauvres, en consolidant les capacités de mise en œuvre et de contrôle des accords de ce type.
Outre ces aspects communs, les stratégies suivantes sont spécifiques à chaque secteur pour les différents typesd'infrastructures :

Une fois de plus ces pespectives sont réjouissantes, et d'ailleurs matériellement possibles si les ambitions restent réalistes, modestes et non démesurées, à l'instar de cette prétendue mise à niveau des infrastructures existantes dans les pays du centre. De quelle concurrence s'agit-il? Celle des Etats? Plus que la concurrence, c'est la complémentarité qu'il vaut privilégier dans cet esprit dans les cadres politiques et legislatifs en question. Si cette concurrence renvoit aux maisons de génie conseil, les domaines d'infrastructures sont pratiquement du ressort d'oligopoles et la concurrence sera plutôt mince.
Comment sera-t-il possible d'accroître les investissements pour l'entretien, lorsque l'on sait la difficulté qu'il y aura, avant cela, à lever les fonds pour la construction des infrastructures. Les contrats doivent en réalité inclure un service de suivi et d'entretien. La formation technique doit être adaptée aux exigences du milieu et non pas être calquée sur celle qui est compatible avec les seuils de développement des pays du centre. Par exemple parfois la construction de pistes utilisant des matériaux locaux et adaptées au territoire peut davantage s'avèrer économiquement rentable et écologiquement supportable pour les populations concernées. L'utilisation du génie militaire et sa reconversion aux projets de développement comme la participation active de l'Etat et des initiatives citoyenne seront aussi des atoûts essentiels pour ces réseaux d'intégration régionale.
Le partenariat mixte doit privilégier les besoins essentiels des populations. Il ne faut pas créer un système à deux vitesses. Avec le secteur publiqu,e ou ce qui en reste, qui se préoccupe des dits besoins urgents des pauvres et le secteur privé qui dote de services les zones aisées et rentables, ou qui doit affamer et ponctionner des zones défavorisées pour rentrer dans ses coûts.
Peut on songer que les pays du G8 fassent ce qui est en leur pouvoir pour rapatrier les avoirs volées aux populations africaines par leurs autocrates, afin de participer aux finacements des infrastructures? Ils ont su dans le passé geler les avoirs de certains de leurs alliés tombés en disgrace, et cela ne devrait pas être techniquement si difficile.

(ii) Combler l'écart numérique : investir dans les technologies de l'information et de la communication
104. Les technologies de l'information et de la communication (TIC), fondées sur l'interaction entre les ordinateurs, les télécommunications et les médias classiques, revêtent une importance cruciale pour l'économie de demain, fondée sur les connaissances. Les progrès rapides réalisés dans le domaine technologique et la baisse du coût du matériel TIC offrent de nouvelles perspectives aux pays africains pour ce qui est de l'accélération de leur croissance et de leur développement économiques. La mise en place d'un Marché commun et d'un Union africaine peut être facilitée, dans une très grande mesure, par la révolution des technologies de l'information. En plus de promouvoir le commerce intra-régional, l'utilisation des TIC peut accélérer l'intégration de l'Afrique dans l'économie mondiale.

Il est clair que certains sauts qualitatifs qu'offrent les technologies pourront servir le développement et l'intégration du continent. Le cellulaire rend par exemple facultatif les poteaux de téléphone et leur difficile entretien. L'internet permet de mettre en rapport des décideurs et des acteurs éloignés de façon efficace. Mais la compétition dans les domaines technologiques, par contre, frappe d'obsolescence très vite les produits. Aussi, il n'est pas forcèment judicieux d'être toujours à jour et adapté aux moindres innovations. Car après tout, plusieurs brevets frappés d'obsolescence sont encore fonctionnels et à la portée de pays en développement. Il ne faut pas surestimer le rôle de la technologie ni sous estimer le fait qu'elle n'est pas neutre. Depuis la fin de non recevoir donné aux demandes pour un nouvel ordre mondial de l'information et de la communication ( NOMIC,1974), les pays africains savent pertinement que les rééquilibrages des flux d'information et des technologies de l'information sont dictés par le profit, les besoins et les normes définies au Centre. Dans cette perspective, il faudra peut être revoir la stratégie de l'ISIA - Initiative pour une société de l'information en Afrique- proposée par la CEA . Elle a été adoptée au sommet de l'OUA de Yaoundé en 1996, et cautionnée par le sommet du G8 à Denver. Elle a lancé une vingtaine de plans nationaux de développement en la matière.
Il semble erronné d'évoquer la baisse des coûts de matériel, dont la démocratisation n'est pas à l'ordre du jour et qui doivent être achetées en devises fortes, souvent élevées par rapport au niveau de vie. Le coût des services d'entretien et de tropicalisation des appareils s'ajoutent à cette facture.
Il apparaît que combler les besoins et et les listes d'attente des consommateurs et la restauration des vétustes systèmes de télécommunication sont la première priorité. L'informatisation des services publics et l'accès du service aux employées, et non pas à la seule hiérarchie en est en est une autre. La démocratisation et la répartition plus équitable des services entre ville et campagne, entre sexe et au sein des ménages en est une troisième.
Il y a un risque d'une dépendance accrue vers le Nord, si ces technologies n'ont pour vocation que l'avènement du marché et la compétition à l'échelle mondiale. Il n'y a donc pas que le marché et son commerce électronique qui est vital. La perspective de rompre l'isolement des zones enclavées et des populations marginalisées est un facteur essentiel. Ce n' est pas forcèment l'ordinateur, mais la radio et autres formes de télécommunication qui vont y remédier. On obtiendra une plus grande circulation de
l'infomation et de la formation à distance, voire la diffusion d'information stratégique médicale ou civique. Ces éléments requièrent de plus en plus l'utilisations des ondes satellites. A ce titre, un satellite continental ou une location d'espace substanciel pour répondre aux besoins croissants s'avère nécessaire. Cela pourrait faire l'objet, avec d'autres mesures appropriées, d'une campagne onusienne des TIC en faveur de l'Afrique. Quelques soient les choix technologiques à faire, il ne faudra perdre de vue l'exigence de les adapter aux moyens économiques et culturels des pays et à leur capacité locale de reproduction technologique

105. L'utilisation généralisée des TIC sur le continent peut présenter des avantages comparatifs sans précédent, comme suit : Elle peut imprimer un nouvel élan au processus de démocratisation et à la bonne gouvernance ; Elle peut faciliter l'intégration de l'Afrique dans la nouvelle société de l'information, sur la base de sa diversité culturelle ; Elle peut donner lieu à diverses applications dans des domaines tels que la télédétection, la planification de l'agriculture et des infrastructures ; Elle facilite la complémentarité entre les outils existants de promotion de la formation d'une masse critique de professionnels à l'utilisation des TIC ; Elle facilite, dans le domaine de la recherche, la mise en place de programmes africains et de programmes d'échange dans le domaine technologique, avec un accent particulier sur la lutte contre l'analphabétisme ; Elle permet d'identifier et d'exploiter les opportunités en matière de commerce, d'investissement et de finance ; Elle permet de mettre en place des programmes régionaux d'apprentissage à distance et d'éducation à la santé pour améliorer la situation dans les secteurs de la santé et de l'éducation ; Dans la gestion des conflits et la lutte contre les pandémies, elle facilite la mise en place d'un système efficace d'alerte précoce en fournissant les outils nécessaires à la surveillance constante des foyers de tension ou d'épidémie.

Il est évident que la liste des capacités d'Intervention des TIC est infinie et qu'elle peut être même davantage infléchie dans le sens du développement authentique de l'Afrique. Il est peut être exagéré de les qualifier d'avantage comparatif. Il s'agit d'avantages tout court, l'Afrique n'ayant pas développé de spécialisation dans ces sphères. Tous ces avantages sont conditionnels à la diffusion et à l'accès horizontal de ces technologies. C'est là que les choix stratégiques de développement importeront. Il faut aussi relativiser leur portée. La fonction repressive de l'Etat peut très bien perturber l'utilisation des outils de technologies par les forces démocratiques. De même, l'Etat peut contrôler ces technologies de sorte qu'elles servent sa conception de la governance, ou celle dans l'acception de la démocratie bourgeoise qui domine dans le néo-libéralisme.

106. Les infrastructures des technologies de l'information et de la communication en Afrique sont insuffisantes, de même que les cadres politiques et réglementaires et les ressources humaines requises dans ce domaine. De ce fait, l'accès à des services abordables en fait de téléphone, de radio-télédiffusion, d'ordinateurs et de l'Internet est inadéquat. La densité de lignes téléphoniques y reste inférieure à une ligne pour 100 personnes. Les coûts des services sont élevés puisqu'une connexion coûte en moyenne en Afrique 20 pour cent du PIB par habitant par rapport à une moyenne mondiale de 9 pour cent et à 1 pour cent dans les pays à revenus élevés. L'Afrique n'a pas encore pu tirer parti de l'outil que constitue informatique et télématique pour améliorer les conditions de vie des populations et créer de nouvelles possibilités d'affaires. Les liaisons entre les pays du continent et avec les marchés mondiaux en souffrent. Quoique de nombreux pays d'Afrique aient engagé des réformes politiques dans ce domaine, ni la pénétration des services, ni leur qualité, ni leurs tarifs ne se sont encore améliorés.

Le constat de cette situation dramatique est attestée par la rareté des moyens et la frustration des utilisateurs et ceux qui souhaiteraient le devenir. Les fonds consacrés par les Etats ont été insuffisants, souvent détournés à d'autres fins. Les responsabilités étatiques deviennent de plus en plus floues, à la faveur de la mondialisation. Mais, la plupart de ces secteurs sont du ressort du secteur privé ou en voie de le devenir. Il est donc aussi important de souligner les responsabilités des déficiences qui incombent à ce secteur.
Les liaisons entre les pays sont dramatiques et les relais anormalement lointains, puisqu'il faut passer par l'Europe ou l'Amérique pour téléphoner à un pays voisin. L'internet souffre de la faiblesse des débits dans les infrastructures de télécommunication. Les coûts de tous ces services sont loin d'être démocratiques et l'emphase mise sur les libéralisations risque davantage de renchérir les coûts de consommation et d'accentuer la dépendance extérieure. Des participations ouvertes à la population aux parts de marché des télécommunications gérées par une économie mixte pourraient démocratiser l'usage des lignes numérisées.

107. Objectifs
Doubler la densité des lignes téléphoniques pour parvenir à deux lignes pour 100 personnes d'ici l'an 2005, avec un niveau d'accès adéquat pour les ménages ; Diminuer le coût et améliorer la fiabilité des services ;
Préparer tous les pays d'Afrique à utiliser les communications électroniques ; Constituer une pépinière de jeunes et d'étudiants compétents dans le domaine de l'informatique et de la télématique pour en tirer des ingénieurs stagiaires en informatique et télématique, des programmeurs et des créateurs de logiciels ;
Mettre au point des logiciels à contenu local fondés en particulier sur l'héritage culturel de l'Afrique .

La prolifération des lignes de téléphones cellulaires est un fait observable. Un nouvel dynamisme en découle. Des prix du marché, des résultats d'élections, des nouvelles à caractère social sont échangés instantanément à l'echelle de pays souvent mal organisés en infrastructures de communication. Pourtant, certaines situations frisent l'anarchie, du fait de la libéralisation effrenée du marché des télécommunications, et du manque de politique cohérente des droits de distribution. Dans certaines villes, les utilisateurs doivent avoir plusieurs téléphones et traverser la rue pour avoir accès à un réseau voisin. Un marché informel de la communication se développe donc et la débrouille permet de mettre en contact ceux qui ont les moyens de le faire. Mais, les coûts restent hors de la portée de l'essentiel de la population. Aussi, il est peut être illusoire d'escompter un résultat de deux lignes dans les trois ans à venir, compte tenu que même une reprise dynamique de la croissance économique ne permettrait pas, pour l'instant, une plus grande distribution des revenus aux consommateurs.
Le contenu culturel africain ne doit pas seulement se refléter dans les logiciels, mais surtout dans la formation technique et professionnelle. Ceci parce que ces technologies sont loin d'être neutres et qu'elles sont les chevaux de troie de la production culturelle de masse des centres dominants. Cette dimension de l'aliénation culturelle peut aller en s'accentant. D'autant plus que des ressources humaines qualifiées du continent aspirent à y remplir à leur tour des fonctions délocalisées d'entreprises du nord, à l'instar de celles dont bénéficient certaines autres zones de la Méditerranée, de l'Asie ou des Caraïbes.

108. Actions :
Collaborer avec les institutions régionales comme l'Union panafricaine des télécommunications (UPAT) et Africa Connection pour concevoir une politique et une législation modèle pour la réforme des télécommunications, ainsi que des protocoles et des références permettant d'évaluer la préparation à l'utilisation des communications électroniques ; Collaborer avec les institutions régionales pour consolider les capacités de réglementation ; Mettre sur pied un réseau d'institutions de formation et de
recherche pour consolider la base de compétences de haut niveau ; Promouvoir et accélérer les projets existants visant à connecter les écoles et les clubs de jeunes ;
Collaborer avec les institutions de financement du développement en Afrique, les initiatives multilatérales (G8 DotForce, Equipe spéciale des Nations unies) et les bailleurs de fonds bilatéraux pour mettre sur pied des mécanismes financiers visant à atténuer et à réduire les risques dans ce secteur.

L'UPAT doit être réformée et élargie afin de pouvoir assumer un rôle véritablement continental dans le domaine. Il ne s'agit pas donc de collaborer avec elle, mais bien de préciser son mandat et de la doter en conséquence. Moins il y aura d'intermédiaires et de paliers, moins il y a aura de la spéculation et de la dispersion, et plus il y aura une démarche cohérente et d'ensemble.
L'institution de cadres réglémentaires et juridiques ne doit pas seulement favoriser le secteur privé. Certes, il importe, pour les investisseurs potentiels voulant développer les TIC, de bénéficier de garanties dans ces cadres. Ces derniers doivent par contre, protéger les consommateurs et oeuvrer dans l'optique d'un accès et l'universalisation des services. Autrement, on enchasse dans les textes l'inégalité des chances qui découleraient de la faible implication de l'Etat, de la hausse des coûts de consommation des utilisateurs.
Les institutions de recherche et de formation pourraient, par le télé-enseignement, prodiguer une formation au contenu panafricaniste et davantage tournée sur les besoins du développement. Le contenu (météorologie, techniques agricoles, participation civique et développement, santé et hygiène, connaissance historique et culturelle...) sera destiné aux écoles, clubs, associations de jeunes et surtout les populations, habituellement géographiquement socialement ou sexuellement, marginalisées.
La multiplication des bailleurs de fonds nécessite une harmonisation des politiques et la compatibilité des matériels. Ceci pose tout le problème de l'aide liée et la nécessité pour les bailleurs de fonds de renoncer à ne privilégier que leurs produits manufacturés lorsqu'un autre partenaire offre une aide plus adaptée et compatible avec les structures existantes.

(iii) Energie
109. Objectifs
L'énergie joue un rôle crucial dans le processus de développement, d'abord en tant que nécessité domestique, mais aussi en tant que facteur de production dont le coût affecte directement le prix des autres biens et services, ainsi que la compétitivité des entreprises. Compte tenu de la répartition inégale des ressources énergétiques sur le continent, il est recommandé que la recherche de sources suffisantes et abordables d'énergie soit axée sur la rationalisation de la distribution territoriale des ressources énergétiques existantes, mais mal réparties. En outre, l'Afrique doit tout mettre en œuvre pour développer ses abondantes ressources d'énergie solaire. Accroître l'accès à un approvisionnement commercial en énergie, fiable et abordable, de 10 à 35 pour cent ou plus de la population d'Afrique en 20 ans ; Améliorer la fiabilité et réduire le coût de l'approvisionnement en énergie pour les activités de production afin de permettre une croissance économique de 6 pour cent par an ; Renverser la tendance de dégradation de l'environnement associée à l'utilisation des combustibles traditionnels dans les régions rurales ; Exploiter le potentiel hydro-électrique des bassins fluviaux d'Afrique ; Intégrer les réseaux de transport d'énergie électrique et les gazoducs pour faciliter les flux transfrontaliers d'énergie ; Réformer et harmoniser les réglementations et la législation de continent sur le pétrole.

L'Afrique, sur les 2,8 milliards d'individus qui ne disposent pas d'énergie pour éclairer une maison ou conserver les denrées au frais, est proportionnellement la moins bien lotie. C'est pourquoi le choix solaire reste le plus judicieux et le plus rentable des choix de développement, autant en couverture urbaine qu'à la campagne. L'Afrique doit résolument et progressivement s'éloigner des combustibles fossiles et poursuivre ses efforts de reboisement. L'avenir passe par la conversion de l'énergie solaire, par des capteurs résidentiels, des centrales thermiques solaires, des cellules photovoltaïques et des photopiles. Pour l'instant, plusieurs problèmes techniques demeurent et il faut étudier sérieusement les expériences en cours, pour améliorer la fiabilité d'une fourniture d'électricité domestique. Avec les autres énergies renouvelables- le biogaz qui offre de grandes possibilités et assure , hygiène, emploi et engrais en plus, l'énergie éolienne ou la géothermie-, le solaire permettrait un développement plus harmonieux et plus écologique. L'utilisation de l'hydro-électricité doit elle se faire plus parcimonieusement, privilégier des projets de tailles moyennes, afin de minimiser les risques écologiques nombreux. Dans les grands chantiers, qui profitent avant tout à toutes les compagnies qui oeuvrent, en amont et en aval des barrages hydro-électriques, il y a des risques imminents et à long terme que l'on fait encourir aux populations et à l'écosystème.
Du fait de la réduction du soutien étatique, du bradage et de la mise en coupe réglée de ce secteur par les multinationales, le renchérissement qui s'en suit rend peu probable l'augmentation à 35% de l'approvisonnement en énergie abordable.
Si l'Etat est si faible dans l'économie, comment le secteur privé pourra doper la production et atteindre un taux de croissance, qui sans consistance avec celui qu'on escomptait (7% au point 68), n'est pas à sa portée, malgré les aménagements énergétiques privilégiés dont il bénéficiera.?
Qui s'occupera des flux transfrontaliers d'énergie? Des multinationales? Le silence du document augure une hégémonie définitive de ce secteur par les firmes énergétiques dont le but, ne l'oublions pas est le profit. Serait -il utile de rappeler que les pays du G8 au sommet d'Okinawa ont recommandé le choix d'énergie renouvelable qu'elle tardent à implanter. En soutenant même que ces technologies et énergie renouvelables fortifieraient le marché avec les pays du sud, le comité qu'ils avaient nommés recommandait que les gouvernements devaient aligner leur politique sur la volonté de payer des consommateurs, en recourant à des mécanismes des marchés nationaux comme des quotas de portfolio et des tarifs incitatifs.
Il est intéressant de réformer et d'harmoniser les lois sur le pétrole. Mais cela ne sert pas le développement si on se s'appesantit pas sur la nature véritable du secteur pétrolier, les concessions et les productions existantes et leur extraversion. La pollution du Delta au Nigéria, la rente en Algérie, le lien avec la guerre et la ponction extérieure au Soudan, les obscures contrats du Cabinda et autres espaces Françafrique, et toutes sortes de pratiques aboutissant toutes au siphonage extraverti vers les pays du centre au détriment de la redistribution continentale nécessitent que le NEPAD aille plus loin dans ses réformes.

110. Actions
Etablir un Forum africain pour la réglementation des entreprises d'utilité publique et des associations régionales de réglementation ; Mettre sur pied une équipe spéciale qui aura pour tâche de recommander des priorités et des stratégies de mise en œuvre pour les projets régionaux, y compris la génération d'énergie hydro-électrique, les réseaux de transport d'énergie électrique et les gazoducs ; Mettre sur pied une équipe spéciale pour accélérer le développement de l'approvisionnement en énergie pour les logements des groupes sociaux à faibles revenus ; Elargir la portée du programme de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC) pour la conservation de l'énergie de la biomasse au reste du
continent.

S'agit il de les réglementer dans une perspective d'intégration régionale ou pour les harmoniser au règne du profit du secteur privé? Quand on voit la suprématie des firmes étrangères dans le secteur de l'énergie on peut légitimment demander qui surveillera le travail de ces équipes spéciales afin de s'assurer que les intérêts des populations seront défendus. Y aura -t-il une compatibilité de travail entre les deux sortes d'équipe l'une oeuvrant visiblement pour des intérêts plus grands et démesurèment plus rentables et l'autre dont la marge de bénéfice semble être plus faible et à seule vocation domestique?
La biomasse constitue un aspect intéressant des solutions d' énergies renouvelables. Mais dèja le bois et rebuts agricoles sont sollicités par la combustion domestique ce qui ne laisse pratiquement que les ordures ménagères, dont la collecte et l'entreposage pose déja problème. La biomasse comme génératrice de combustible suppose que les mêmes surfaces agraires cultivées à grande échelle assurent autant les produits escomptés que l'énergie à transformer. Pour toutes ces raisons ce choix n'apparaît possible qu' à long terme seulement

(iv) Transports
111. Objectifs
Réduire les délais de la circulation transfrontalière des personnes, des biens et des services ; Réduire l'attente et les temps morts dans les ports ; Promouvoir l'activité économique et le commerce transfrontalier des marchandises sur la base de meilleurs liens de transport terrestre ; Accroître les liaisons de transport aérien des passagers et du fret entre les sous -régions d'Afrique.

Dans ce domaine, les relations intra-africaines souffrent de lacunes manifestes. Les populations s'ingénient à trouver les moyens de circuler dans des infrastructures déficientes et recourent à des moyens vétustes et dangereux. Les détours au niveau aériens sont la norme sur plusieurs destinations.
Les efforts à entreprendre sont colossaux et requièrent des participations étatiques pour seconder le secteur privé. La mésaventure d' Air Afrique, malgré sa mise sous tutelle néo-coloniale, doit être remémorée. Les accords de coopération régionale entre pays disposant de flotte aérienne et navale doivent aller dans le sens de la complémentarité , avec des tracets desservant les escales principales. Le chemin de fer reste cependant un outil fantastique de désenclavement et de raccordement. Il est d' un coût plus abordable que la plupart des autres moyens pour le transport de masse et de commerce.
Il va falloir trouver aussi un accomodement et une reglémentation du secteur informel de transport qui a su répondre dans les circonstances de rareté aux besoins des usagers.
Une démarche panafricaine et xénophile de levée des frontières, ou en tous cas de grande tolèrance en matière de visas, est un préalable à la circulation régionale et continentale. Elle réduirait le temps de circulation et favoriserait l'intégration continentale.

112. Actions
Mettre sur pied des équipes spéciales dans le domaine des douanes et de l'immigration afin d'harmoniser les passages de frontières et les procédures de délivrance des visas ;
Mettre en place et favoriser des partenariats entre les secteurs public et privé pour l'octroi de concessions pour la construction, l'aménagement et l'entretien des ports, des réseaux routiers, des réseaux ferroviaires et de transport maritime ; Promouvoir l'harmonisation des normes et des réglementations selon les modes de transport et l'utilisation accrue de services de transport multimodal ; Collaborer avec les organisations régionales pour mettre en place des couloirs de développement du transport ; Promouvoir des partenariats entre les secteurs public et privé pour la rationalisation de l'industrie du transport aérien et le renforcement des capacités dans le domaine du contrôle du trafic aérien.

La xénophibie et le panafricanisme, une fois de plus, doivent animer ces actions.
Il y a fort à craindre que ces partenariats ne profitent qu'au secteur privé. Il faut tout faire en sorte d'avoir une économie mixte équilibrée afin que les parts de responsabilité de part et d'autre soient assumées. Autrement, ces concessions ne serviront qu'à ceux qui pourront en disposer et à ceux qui pourront en défrayer les coûts de service. Ce service devrait aussi éviter de s'hypertrophier, ce qui conduit à ne desservir que certains secteurs au détriment de vastes régions.
L'implication obligatoire des Etats payant régulièrement leur quote-part dans les projets aériens, maritimes et ferroviers communs assure un équilibre au transport régional et continental en réduisant l'hégémonie du volet privé.

(v) Eau et assainissement
113. Objectifs
Assurer un accès durable à un approvisionnement en eau pure et potable et à un assainissement adéquats, particulièrement pour les pauvres ; Planifier et gérer les ressources en eau pour en faire la base de la coopération et du développement aux niveaux national et régional ; Examiner systématiquement et préserver les écosystèmes, la diversité biologique et la faune ; Assurer la coopération sur les fleuves que se partagent plusieurs Etats membres ; Aborder la menace du changement climatique de façon efficace ; Accroître l'agriculture irriguée et pluviale pour améliorer la production et la sécurité alimentaire.

Objectifs louables compte tenu de la difficulté de concilier les ponctions croissantes avec les ressources disponibles, sans pour autant affecter l'environnement. Entre la pression démographique et la raréfaction de l'eau douce, la gestion de l'eau demande un effort des gouvernements consistant et responsable. Or, à la faveur du désengagement de l'Etat, la privatisation de la ressource, au nom d'un poids financier qu'il ne peut supporter augure de perspectives graves. Ceci notamment en terme de redistribution, d'accès, de pénurie et d'assainissement. Les plus pauvres, voire même des populations qui ne le sont pas ont et auront, si la tendance de brader ce secteur se maintient, de la difficulté à disposer d'eau potable à un prix raisonnable. De plus en plus, les prix réfléteront la compétition des firmes aquifères, les coûts élevés de service- comme l'épuration ou colmater les fuites dans la distribution- et la rareté du précieux liquide.

Plusieurs cours d'eau sont déja sources de litiges frontaliers graves et leur résolution passe par une intégration rapide des régions africaines sous peine de les voir dégénérer. Dans plusieurs cas, une réglementation stricte sur le débit des ponctions et l'accès aux cours d'eau devront être équilibrés avec la flexibilité à observer pour les frontières arbitraires qui caractérisent les Etats.

Il est important de surveiller et d'analyser davantage l'impact du réchauffement de la planète, de l'irrigation et la contamination de l'eau par la production et la consommation en Afrique. Une recension des sources d'eau renouvelables par l'étude des étendues d'eau de ruissellement aussi est souhaitable.
Quoique dans certains cas nécessaire, l'emphase sur l'agriculture irriguée, couplée à une augmentation des surfaces agricoles comporte des dangers qu'il faut soigneusement éviter. Car les surface agricoles et les espaces aquatiques sont dispersés et rares et les coûts d'exploitation élevés. Les techniques d'utilisation optimale des eaux pluviales, l'aspersion , le goutte-à -goutte, les collectes par rétention et autres moyens doivent aussi être considérés. On obtient tout aussi bien une maximisation de la productivité, au moindre impact sur l'eau disponible. Cette dernière doit être protégée de tout enfouissement de déchêts toxiques, de contamination par les intrants agricoles (fongicides, herbicides, pesticides, engrais chimique) qui doivent privilégier des moyens organiques et biodégradables.

114. Actions
Accélérer les travaux des projets sur les ressources en eau à objectifs multiples, comme par exemple l'étude du Secrétariat de la SADC de l'exploitation du fleuve Congo et l'Initiative du Bassin du Nil ;
Mettre sur pied une équipe spéciale pour planifier les effets néfastes de l'impact du changement climatique sur l'Afrique ; S'associer à l'Initiative mondiale pour l'assainissement de l'environnement afin de promouvoir des méthodes et des projets sanitaires d'élimination des déchets ; Appuyer le Programme Habitat des Nations unies sur la conservation des ressources en eau dans les villes africaines.

On peut difficilement accélérer ces projets polyvalents, sans une intégration régionale plus effective. Autrement, on crée des hégémonies de pôles d'Etats plus puissants qui bénéficieront des retombées au détriment des autres. Il faudra aussi songer à des projets d'envergure plus modestes, et aux coûts écologiques réduits
Le NEPAD ne mentionne pas que le continent participe déja à plusieurs programmes que ceux qu'il retient. Ils sont sous l'égide d'instances internationales. Le fait est que, de plus en plus, la plupart traitent le problème de l'eau comme une marchandise, sous la houlette de la Banque Mondiale, et dans une moindre mesure le PNUD ou la FAO. Ainsi le Forum mondial de l'eau au sommet de la Haye en l'an 2000 a proposé des politiques de régulation. La Déclaration de Kampala 2001 elle, plaide pour l'érosion des tutelles publiques avec ses faiblesses de fourniture hormis aux privilégiés, et l'avènement de l'assainissement et l'exploitation de l'eau par le secteur privé. Dans les grandes villes africaines ou la pression sociale ne correspond pas aux infrastructures essentielles (égouts, traitement des eaux usées, voierie, et autres problèmes d'hygiène) le rôle de l'Etat et du civisme citoyen sont essentiels pour ne pas abandonner ces secteurs au secteur privé.