Les opinions exprimées ici ne sont pas nécessairement celles du GRILA
Une solution aux problèmes de gestion et de règlement des conflits en Afrique, applicable en zone interlacustre (Aziz Salmone Fall)
Une solution aux problèmes de gestion et de règlement des conflits en Afrique, applicable en zone interlacustre (Aziz Salmone Fall)
Africa Pax:
Une solution aux problèmes de gestion et de règlement des conflits
en Afrique, applicable en zone interlacustre


Par Aziz Salmone Fall

Depuis 1885, l’Afrique, au niveau stratégique et géopolitique, n’arrive toujours pas à régler les graves problèmes de l’Etat et des frontières.
1. Aujourd’hui, songer à la sécurité en Afrique, c’est se souvenir qu’entre la période où la France a procédé à ses premiers essais nucléaires dans le sud algérien, jusqu’à ces derniers mois où elle les a officiellement achevé après 30 ans d’expérimentation dans les atolls polynésiens de Tuamotu, ce continent a perdu de loin plus de vies que n’auraient pu en décimer plusieurs bombes à l’instar de celles qui meurtrirent Nagasaki et Hiroshima. Pourtant, à part l’Afrique du Sud qui a renoncé sous Mandela à poursuivre son programme nucléaire, le nucléaire n’est plus à l’ordre du jour sur le continent. En effet, le 11 Avril 1996, le traité de Pelindaba fait de l’Afrique une zone non nucléaire avalisant ainsi la décision des pays africains du 23 juin 1995.

2. De toute évidence, point n’a fallu d’armes nucléaires pour atteindre un si macabre résultat en Afrique, et le plus souvent aucunes des armes qui y contribuèrent n’étaient forcément sophistiquées . En dépit de quelques combats de tanks et d’avions, ce fut le plus souvent avec des armes légères et surtout des machettes. Ces dernières à elles seules sont capables d’holocauste, comme il y a deux ans au Rwanda. Notons qu’en dépit de leur prolifération, la quasi totalité des armes utilisées sont conçues hors du continent (excluant le cas sud-africain et zimbabwéen autosuffisants)

3. La grave crise des Grands lacs qui menace d’implosion plusieurs Etats nous interpelle tous. Il est illusoire de penser pouvoir résoudre de façon localisée ces conflits alors que la solution passe par une dynamique ‘sécuritaire’ impliquant tout le continent. Une perspective africaine qui nous permette d’orienter nos efforts sur la démilitarisation des régimes belliqueux et des groupes armés ( tout en endiguant les subterfuges des marchands de canons et autres contrebandiers) qui se préoccupe d’une reconstitution de l’équilibre écologique, allant du déminage à la sauvegarde des points d’eau et des terres arables; qui tente de résoudre le problème de l’épanouissement de la société civile et des réfugiés, passerait par une volonté politique des décideurs africains et internationaux incompatible avec l’ordre mondial actuel. Dans le dit nouvel ordre mondial ,l’Afrique vit la "gestion de l’enlisement" , et de plus en plus, la <> des institutions de Bretton-Woods. De toutes parts fleurissent des discours sur la compétitivité dans le respect des contre-pouvoirs de la société civile et du marché. Qu’en est il de l’intégration africaine dans tout cela? L’intégration requiert bien d’avantage. L’échec de l’intégration économique montre qu’il faut enclencher une intégration politique et militaire en parallèle. Pour ces motifs, nous proposons une force de maintien de la paix et d’interposition interafricaine nommée Africa Pax. Elle s’articule sur des mesures volontaristes mais concertées, énergiques et basées sur le droit, qui pourraient changer favorablement et durablement le cours des choses. L’ampleur des changements à opérer peut sembler démesurée. Il s’agit surtout de faire les choses au fur et à mesure, en les orientant dans la direction de la souveraineté politique africaine, au moment où le système mondial subit une hiérarchisation géostratégique et économique accélérée. Le propre de cet article sera d’identifier quelques obstacles aux solutions africaines, notamment, en faisant état de la position des grandes puissances, et d’esquisser quelques propositions de solutions valables pour le cas des Grands lacs en particulier et pour le continent en général.

Les échecs des tentatives d’intégrations économiques en Afrique sont étroitement liés à la nature de l’Etat-nation, de ses projets de société, et au type d’ordre qu’y privilégie la mondialisation. On peut constater l’échec des bourgeoisies nationales à impulser une construction nationale indépendante, même intégrée à l’économie mondiale, et surtout leur incapacité à générer une autonomie collective, que ce soit dans des schémas de type CDEAO , PTA, ou SADCC. Alors que bien souvent la préservation frileuse de prérogatives nationales paralyse les meilleures initiatives, les décisions de l’OUA, comme de ces instances régionales, en dépit souvent de leur bien-fondé dans le sens du progrès social des peuples africains, restent le plus souvent lettre morte. Ceci n’empêche pas la prolifération des organisations et la multiplication de leur mandat. Au surplus, le décalage entre les proclamations d’intégration et la poursuite économique dans ce sens est frappant. Non seulement les grandes puissances ne tiennent pas compte de ces décisions, mais les régimes africains eux-mêmes n’assument pas les implications de leurs propres décisions, souvent à contre-courant de l’intégration passive au marché mondial.
L’opportunité d’utiliser un mode d’intégration politico-militaire pourrait dès lors s’avérer être une piste intéressante en vue d’un plus grand effort de coopération économique pour s’adapter à la mondialisation et contrer certains de ces effets dans le cadre d’une plus grande autonomie collective régionale. A cet effet, il apparaît évident qu’une indépendance militaire et politique sans envisager sa base économique demeure une utopie. Notre hypothèse est que l’intégration au niveau ‘sécuritaire’ pourrait agir comme levain d’un processus où s’imbriqueraient toutes ces dimensions. Encore faut-il que les composantes qui constitueraient un tel ensemble puissent s’accorder..
Il faudrait donc avoir à faire à des Etats de droit et non à des autocraties manipulant les déséquilibres ethniques, religieux, régionalistes ou idéologiques pour monopoliser les rouages de l’Etat; à moins d’imaginer la fédération d’Etats dans de grands espaces trans-étatiques. Evidemment, les contradictions inhérentes au nationalisme étatique africain arc-bouté, sur les micro-Etats, et soumis à la tentation compradore, sont autant d’entraves à un tel processus.6 Certains Etats africains sont mûrs pour une telle intégration, mais ils restent minoritaires. Dans la plupart des autres , devant le tarissement des ressources, les circuits clientélistes de redistribution - par patronage, népotisme, favoritisme et régionalisme - sont sommés de se réajuster au plus pressant et au plus rentable politiquement et économiquement. Lorsque l’alternance démocratique s’exerce, souvent le ressentiment des perdants qui jouissaient des prébendes les confine dans l’opposition, et même parfois à la riposte armée grâce à leurs milices et autres forces privées alimentées par la délinquance. Quant au nouveau régime au pouvoir, sa marche de manoeuvre ne le diffèrencie pas beaucoup des régimes où il y a absence d’alternance démocratique. Dans les deux cas, on assiste plutôt à la consolidation de l’étatisme autoritaire qu’exige la mise en place des réformes pour l’intégration à l’économie mondiale. Cet autoritarisme des dirigeants génère la résistance populaire. Celle-ci s’organise le plus souvent informellement à la base, en associations, collectivités et réseaux enclins à se détourner de l’Etat. Ils n’en expriment pas moins des revendications démocratiques et des aspirations pour la redistribution socio-économique et la sécurité humaine. Ces demandes se ramifient malgré tout jusqu’au sein de l’Etat. Une mention spéciale doit être faite pour ce qui semble pour l’instant n’être que des velléités culturalistes ou fondamentalistes, expression de forces antisystèmiques locales. En général, elles puisent dans le désenchantement populaire issu de l’incapacité de concrétiser localement les aspirations à la modernité. De plus en plus on les dépeint en Occident par leurs exceptions les plus radicales comme le Soudan ou l’Algérie. Cette surenchère de la déstabilisation amène les régimes africains à se ruer pour l’alignement sur l’OTAN.14
Devant ce manque d’autonomie à structurer localement la question de la paix sans l’influence des superpuissances, il faut poser l’enjeu de l’équilibre stratégique dans la dynamique Nord-Sud. Ce n’est pas pour sous-estimer la dynamique Sud-Sud, mais pour bien faire ressortir que l’influence des grands de ce monde reste encore trop déterminante dans le contexte ‘sécuritaire’ africain. Comment oublier que sous le prétexte de l’anti-soviétisme ou de l’anticommunisme primaire ont été contrariées et brisées toutes les expériences qui optaient pour une construction en marge du néocolonialisme. Aujourd’hui encore, le même frein persiste, quoique plus subtil, puisqu’ exercé par les élites locales qui ne veulent pas céder aux aspirations populaires africaines. Les méthodes pour décourager les populismes progressistes africains ont varié selon les cas, allant du boycott implicite, à semer et attiser la zizanie, à l’assassinat, voire à la guerre. Récemment, l’échec des opérations somalienne et rwandaise; les récentes interventions aux Comores et en république Centrafricaine; l’apathie devant le cas burundais et les conciliabules dans le cas du Zaïre imposent un retour sur les positions et les comportements des puissances en Afrique.
La position de quelques puissances
La France

C’est la puissance la plus active sur le continent. Ce n’est un secret pour personne, la France dispose d’un pré-carré africain. Pour sa sauvegarde elle est intervenue une trentaine de fois militairement depuis la fin de la période coloniale 7 Toute une armature juridique et institutionnelle l’y prédispose et l’y autorise. Assurément, ce qui se passe derrière les enceintes officielles de l’Elysée reste bien énigmatique, comme du reste demeurent nébuleux les paliers de la coopération avec l’Afrique. Les contradictions et nuances propres à chacun des intervenants, sur lesquels les dirigeants africains parviennent parfois à user d’influence, ou à jouer les uns contre les autres, n’empêchent pas la communauté de vue quant à la poursuite de l’entreprise hégémonique *... Rouvez montre que la période souvent qualifiée de mondialisation, donc amorcée dans l’ère de Mitterrand , a été l’occasion de poursuivre l’élan interventionniste, même lorsqu’il s’agissait d’affaires internes issues du mécontentement populaire. Gabon 1990, Libéria 1990, Rwanda 1990, Djibouti 1991, Zaïre 1991, Togo 1991, Tchad 1992, Somalie 1992-93. 8. Quelques signes encourageants pendant l’intermède de Mauroy- cessation de vente d’armes à Pretoria, indexation du Zaïre, droit à l’autodétermination de l’Erythrée et du Sahara- ont laissé croire à un changement d’attitude, mais très vite le réflexe néo-colonial a repris le dessus.
Dans cette lancée, en perspective de 1997, la France escompte raffiner ses stratégies gaulliennes et opte pour une stratégie de défense axée sur l’interopérationnalité. La FAR, force d’action rapide produit de la restructuration de l’ancienne force d’intervention, autour de 47 000 hommes , est sensée assister les pays amis en crise ou impliqués dans un conflit; et y sauvegarder les intérêts et la sécurité des français. 9 La FAR alimente les bases africaines d’infanterie marine ainsi que la légion étrangère basée en permanence dans les territoires outre-mer et dans les bases de l’océan Indien, de l’Afrique Centrale et de l’Ouest. On note une décroissance des effectifs outre-mer due aux compressions budgétaires et à la faculté de déployer désormais plus vite de l’hexagone les troupes vers les bases stratégiques. La nouvelle vision de la politique africaine de la France, telle que son président l’a esquissée le 18 Juillet 1996 devant le parlement congolais à Brazzaville laisse croire à une relation stable avec un continent < de nations en paix et solidaires...ayant leur propre modèle>. Ce discours n’est pourtant pas neuf, comme il ne peut dissimuler les leurres politiques et idéologiques, souvent repris en choeur par un certain parterre médiatique dont la désinformation confond autant l’opinion publique que, les détracteurs et ennemis à combattre. On peut ainsi convaincre l’opinion publique de la pertinence et de la légitimité d’une intervention.
De fait, la plupart des chefs d’Etats français ont su tenir à leurs pairs africains le langage qu’ils aiment entendre. Cela n’exclut pas la brouille, la réprimande et la réaction musclée à la moindre sérieuse incartade de l’un d’eux, comme de voler à son secours lorsque le besoin s’en fait sentir. A cet égard, les appels à l’aide des autorités africaines ont moins de poids que l’intention ou non de Paris de s’engager. C’est pourquoi tout leader africain qui acquiesce à ses desiderata sera toujours soutenu en priorité.
Avant d’en arriver à une riposte armée la capacité de dissuasion et de coercition de la France a de multiples recours. Les pressions politiques peuvent compter sur les services de renseignements qui mesurent les enjeux et le niveau de gravité. A priori, les autorités peuvent ainsi évaluer certaines conséquences de l’intervention. Elles bénéficient d’autres atouts aussi . Avec les avions et les bateaux, lors des manoeuvres et exercices sont cumulées des informations tactiques et effectuées plusieurs simulations d’attaque d’objectifs stratégiques. Plus sophistiquée l’information des télécommunication satellites , apprise avec Syracuse I et II, Hélios, Spot I et II, et misant sur Spot IV qui aura une vocation militaire et qui assistera Hélios capable de distinguer des objets de 1 mètre retransmis en séquence numérique en temps différé ou réel. La coopération au niveau de la télédétection de la géomatique et de la modélisation entre puissances de l’OTAN laisse présager un autre type d’échange d’information tactique sur l’Afrique dans un avenir proche. Déjà, il est possible pour toute armée ou organisation équipée d’appareil de captage télémétrique d’avoir accès au GPS (Global Positioning System, ou système de positionnement global articulé sur 24 satellites après une initiative des Etats Unis) qui a fait ses preuves dans la guerre du golfe. Même si les Américains ont encore la possibilité de brouiller les pistes afin de se réserver la primeur de la meilleure lecture télémétrique, rien n’exclut un plus grand partage de l’information avec la France moyennant d’autres avantages. 10 La collaboration n’est pas pour autant tout le temps acquise comme on a pu le voir pour les comptages différents des américain et français du nombre des réfugiés des Grands lacs. Mais, c’est surtout sur le terrain qu’existe l’information et qu’elle est collectée et entretenue par l’armature des accords de défense.
Les accords bilatéraux ne sont pas essentiels à l’intervention française, puisque bien des interventions eurent lieu sans leur préalable. Pour l’instant, le Cameroun, la RCA, les Comores, le Sénégal, le Gabon, le Togo, la Côte d’Ivoire, et Djibouti les ont paraphés. D’autres comme la Mauritanie sont liés par des liens secrets que l’on ne révèle qu’après une intervention (Lamantin 1977). Le Burkina-Faso, le Niger bénéficient de soutiens tactiques et logistiques. En fait la plupart des pays de la sphère française ont des instructeurs et des conseillers militaires français. Ils sont soit déjà dans les pays où la France compte des bases militaires et des troupes (RCA, Tchad, Côte d’Ivoire, Djibouti, Gabon, Sénégal), soit envoyés ailleurs où leur compétence est requise. Dans ces accords de défense , plusieurs clauses pour la fourniture d’armement permettent qu’il soit troqué parfois contre des matières premières stratégiques. Rouvez constatait qu’on pouvait analyser la probabilité de l’intervention française en terme d’évaluation pragmatique des conséquences de déstabilisation plutôt qu’en terme de légalité. Le cas du Rwanda est sans doute une des exceptions à cette constante. Pour l’instant, quelques 23 pays africains seraient liés par des accords de coopération militaire. La formation, les entraînements, les manoeuvres, l’assistance technique, les stages dans la métropole, et l’appui logistique en armes sont autant de contraintes pour une éventuelle autonomie sécuritaire des pays africains qui ne peuvent se dissocier simultanément de pareil parrainage, à moins d’entreprendre des mesures volontaristes que nous verrons plus loin.
Tout bien considéré, l’armature géostratégique française autour et dans le continent dissuade la perspective d’une intégration africaine au niveau militaire. Comment les bases en terre d’occupation française: la Réunion, Mayotte, les îles éparses, Diégo Suarez au statut ambigu où il existe d’ailleurs un relais pour le GPS; les bases des forces de présence, Dakar, Port Bouet, Libreville, Djibouti, sans compter celle des forces temporaires déplacés aux besoins des crises (Bangui) peuvent-elles subsister dans le cadre d’une intégration africaine effective? D’autant plus qu’ insatiable l’appétit stratégique de la France lui permet d’étendre son giron aux territoires lusophones ou à d’autres comme la Guinée équatoriale..
Dans sa politique africaine, la France a toujours l’air d’être à la croisée des chemins. En réalité, elle continue à oeuvrer dans sa lancée et fait de sa politique africaine son tremplin de rayonnement comme grande puissance. Conservatrice, Paris ne renonce pas à ses inclinaisons néo-coloniales dans la lignée de Foccard, privilégiant stratégie et affairisme dans des raffinements de clientélisme. Dans ces circonstances quelle contradiction avec les remontrances du sommet de la Baule dans les exigences de probité, de respect des droits de la personne, de démocratie et de justice sociale !. Ces exigences sont sacrifiées au nom d’une politique désuète, paternaliste et ternie, se bornant à la préservation statique d’un statut dont elle croit disposer au niveau international. De surcroît, un droit d’ingérence militaire lui permet de s’immiscer militairement et politiquement dans toute crise qui prend des allures compromettantes pour ses intérêts. Une réforme sérieuse et en profondeur des rouages complexes de la coopération française en Afrique permettra de secouer cette politique traditionnelle qui, malgré beaucoup d’agitations en période de crise, néglige l’Afrique en général dans l’hexagone. C’est bien ce qu’a constaté un de ses chercheurs Bourmaud.: "In the speeches and writings of the political personnel dealing with foreign policy in France , the marginal place accorded Africa is quite remarkable. In this sense, Africa’s visibility is inversely proportionnal to its effective role in the strategie of influence so nurtured by France...Thus the relation of Africa to France remains the same: omnipresent in fact, but utterly abandoned in thought."
La Belgique

Cet autre pays européen a aussi une position stratégique dans certains Etats africains. La Belgique y est intervenue à dix reprises depuis 1960. 12 Des accords de coopération l’ont liée surtout au Zaïre, au Burundi et au Rwanda . Comme elle ne signe pas d’accords formels de défense, certains retraits lui sont plus faciles comme au Burundi ou au Rwanda. Elle dispose en outre d’une force de déploiement rapide, vend des armes, et dit défendre une communauté identitaire tout en promouvant son rôle au sein de l’OTAN, l’ONU et sous le parapluie américain. Il importe de rappeler ici que les troupes belges et des Nations Unies étaient en charge de la surveillance de l’aéroport d’où a été abattu l’avion des présidents rwandais et burundais. L’importance de cet événement, comme déclencheur du génocide, impose que soit faite la lumière sur les commanditaires compte tenu des rumeurs d’une complicité belge, ougandaise et américaine, dans cet attentat.
Le Portugal

D’une colonisation qu’il n’avait pas les moyens d’assurer sans la présence de firmes multinationales, le Portugal tenta désespérément et cruellement d’empêcher les indépendances. Sa défaite, qui destitua le régime à Lisbonne par la révolution des oeillets, l’effaça pour un temps des aventures africaines. Le retour sur le continent est amorcé à la fin des années 80 et sa politique africaine semble de plus en plus teintée par l’affairisme et les anciennes accointances. Le Portugal campe aujourd’hui sa politique africaine dans le sillon américain.

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La Grande Bretagne

Ce pays, pourtant capable de déployer très rapidement une force d’intervention, a adopté une position plus réservée pour ce qui est de ses incursions africaines depuis l’ère des indépendances. Du fait de son mode de colonisation dit Indirect Rule et du système d’accession de ses colonies aux indépendances, la Grande Bretagne a fini par opter pour une diplomatie et un affairisme plus feutrés et une autre méthode pour ses relations stratégiques en Afrique. Aussi privilégie-t-elle la formation militaire. Elle en dispense par exemple au Kenya et, au besoin de ses leçons de démocratisations, cela peut constituer un bon levier de négociation. Des attachés militaires et des conseillers n’en sillonnent pas moins le continent comme au bon vieux temps de l’empire, allant de l’Ouganda au Nigeria, au Soudan - jusqu’en 1990- fournissant des formations aux pays de la ligne de front durant l’apartheid, lesquelles se sont d’ailleurs poursuivies avec le Zimbabwe, le Mozambique, le Botswana, et la Namibie.
Ces relations privilégiées au sein du Commonwealth sont, advenant une crise, préservées par un bouclier de défense articulé sur un pourtour de bases stratégiques, autour de l’Afrique: Malte, Gibraltar, et potentiellement Tristan da Cunha et Sainte Hélène même si celles-ci ne sont pas bien dotées de facilités aéroportuaires. Pour bien tenter de se démarquer de l’apartheid aux abois, elle apporta son soutien tactique au Zimbabwe et aux Botswana pour les techniques contre-terroristes-. Elle fit de discrètes interventions à l’instar de son implication dans de la prise d’otages en Gambie en 1981, ou dans l’avènement de la nouvelle armée namibienne, et comme tentative de réconciliation nationale pour l’armée angolaise. En général, Londres s’aligne sur les orientations stratégiques américaines
La Grande Bretagne dispose d’un dispositif d’alerte pour évacuer ses expatriés et ne manque pas de participer dans des opérations conjointes, comme en Somalie durant Restore Hope. Son allérgie à l’intervention directe et au pré-carré, tant que ce qu’elle considère comme son territoire n’est pas menacé ( exemple les Malouines) , n’enlève en rien à son influence sur le continent. Ses services secrets et diplomatiques sont des plus actifs.
Les Etats Unis

Bien qu’elle n’ait pas de passé colonial en Afrique, l’Amérique s’est employée à y contrer l’influence marxiste et plus précisément soviétique, tout en érodant l’hégémonie des anciennes métropoles coloniales afin d’élargir son espace d’expansion. La prégnance de l’impérialisme américain est davantage liée à sa prétention de leader, à l’emprise de ses firmes et à la complémentarité atlantiste. De ce fait, elle peut en principe compter sur les anciennes puissances colonisatrices. Son influence remonte à l’affaire de Suez, à la crise du Congo, à sa politique de soutien à l’apartheid, voire des opérations du genre Angolan Task Force.. L’objectif des années 80 d’apparaître comme le ténor des intérêts occidentaux dans le Monde n’excluait pas l’Afrique.
Depuis que le réalignement issu de la guerre froide opère, les Etats-Unis considèrent désormais qu’ils appartiennent à un premier groupe d’Etats, dit la communauté des Nations, et qui se caractérise, comme le soutenait son ambassadeur aux Nations Unies, M. Albright, par leur préoccupation à sauvegarder l’économie mondiale et sa communauté d’Etats, en misant sur les relations multilatérales pour les harmoniser. Viendrait ensuite un second englobant les lesquels en dépit du fait qu’ils partagent les préoccupations du premier groupe, sont exposés à des . Il y a ensuite le troisième groupe constitué de Enfin ,subsisterait le groupe de ceux qui ont échoué n’ayant plus < de gouvernement, dont l’économie est détruite et où le chaos règne souvent> 13.
Les Etats-Unis se sont employés, à l’approche des années 90 et durant ces années, à s’assurer au moins de trois choses:
-1) Hypothéquer tout changement progressiste en neutralisant les réformes nationalistes radicales par des cohabitations contre-nature: Lancaster House, Namibie SWAPO-DTA, Inkhata-ANC-PN, MPLA-UNITA, FRELIMO-RENAMO, FRODEBU-UPRONA, etc ceci afin d’avoir des gouvernements de coalition ou des régimes dont l’objectif commun se bornerait à chercher l’intégration dans l’économie mondiale.
2) Soutenir la stratégie des institutions de Bretton-Woods, avec emphase sur le marché, le désengagement de l’Etat et la governance.
3) Alimenter, tout en le contrant, certains courants de l’islamisme intégriste qui devient la nouvelle cible stratégique.
Ces priorités s’insèrent cependant dans un contexte où le Congrès, comme l’opinion publique, rechignent aux aventures africaines et à un surcroît d’aide. C’est ce que tente de contrer le lobby africain-américain. Mais son poids est négligeable lorsque l’on voit, comme la constaté Ben Yahmed, que bien représentant 12% de la population totale, cette communauté influerait 700 fois moins que la communauté juive qui ne forme que 2,5% de la population. Les Etats Unis consentiraient à chaque africain 1 dollar par an, contre 700 dollars par an pour un israélien.
Dès 1986, suite à la loi Gramm-Rudman-Hollings pour la réduction des déficits , la réduction de l’assistance militaire, à l’instar de l’aide économique aurait fait passer le financement de 279,2 millions à 11,39 millions.
L’échec de l’aventure somalienne, à priori en terrain conquis, mais qui a négligé les particularités culturelles de sous-clans et le statut des aînés, n’a pu être compensé par la surenchère médiatique. De même, la désagrégation du fleuron libérien- lien depuis 1847 avec l’Amérique des multinationales et garantie de la plus grande flotte navale américaine battant pavillon libérien - a laissé un goût amer.
A Washington, les fonctionnaires se chargent du suivi pragmatique des opérations alors que l’administration politique se hasarde à cautionner désormais une stratégie africaine de prévention et de règlements des conflits sous la coupole des Etats Unis. C’est ainsi que, croyons-nous, tant nos suggestions sur Africa Pax, que les idées de Mazrui concernant Pax Africana sont vidées de leur substance et récupérées par l’initiative américaine dénommée ACRF, . En prétendant, tout d’un coup, privilégier des solutions africaines aux problèmes africains, l’administration démocrate peut justifier la poursuite de sa coopération, si minime soit-elle en Afrique, et ne pas trop prêter le flanc aux critiques républicaines de gaspiller l’argent du contribuable. Ainsi l’ACRF selon Christopher: <...has many contingent elements. We would like to develop that force for use in various ways. Primarely, as a humanitarian concept at the present time, but also if the forces are there, trained, integrated and able to work together we have other options that we are completely deprived of, at the present time.George Moose, the assistant secretary for african affairs, has reported that his initial trip to Africa provided encouraging indications that African countries are prepared to supply the troops. We will consult with our european allies to see if they are prepared to help by providing the logistics and financial support..... at the same time, in each of the countries where i’ill be meeting with leaders, I’m going to be talking about the ACRF, urging them to--not only to contribute themselves, but to urge other african leaders to participate>.

Le président Tanzanien Mkapa a été le premier à applaudir l’initiative Pax Americana ACRF, en précisant que le fait qu’elle ne soit pas une force permanente, mais plutôt une entité agissant ponctuellement pour des opérations spécifique, était une bonne chose.
Le président Mandela pour sa part, a été plus sceptique, considérant que c’est là l’affaire des africains et d’eux seuls. Il ne manquait pas ainsi de rappeler que, à l’instar de la vente d’armes à la Syrie, que les américains n’avaient pas à dicter à l’Afrique du Sud sa politique extérieure.
A luta Continua
G.R.I.L.A (Groupe de Recherche et d’Initiative pour la Libération de l’Afrique)
This opinion article was written by a independent writer. The opinions and views expressed herein are those of the author and are not necessarily intended to reflect those of GRILA