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La Campagne Internationale Justice pour Sankara (CIJS), 28ème commémoration
La Campagne Internationale Justice pour Sankara (CIJS), 28ème commémoration
La Campagne Internationale Justice pour Sankara (CIJS), 28ème commémoration

Ce 15 octobre 2015, nous commémorons la 28ème année de l’assassinat de Sankara dans une

ambiance unique. Cette conjoncture historique particulière donne de l’espoir à tous ceux

qui sont épris de justice et luttant contre l’impunité. Le 17 Septembre dernier, le juge

d’instruction Yaméogo devait divulguer les résultats de l’autopsie de Sankara et de ses

douze camarades d’infortune. Il en a été empêché par une sanglante tentative de coup

d’état, perpétrée quelques heures auparavant, par certains de ceux-là même qui ont commis

l’assassinat de Thomas Sankara. Le peuple les ayant chassés, le juge a pu finalement

procéder, ce 13 Octobre 2015 de 09 heures à 13 heures, à la restitution des rapports

d’expertise balistique et d’autopsie en présence des parties civiles, des inculpés ainsi que

des conseils.

Selon le rapport d’autopsie préliminaire divulgué, le corps présumé du président Sankara

aurait été lâchement criblé de balles de différents calibres. Me Farama a soutenu devant la

presse : « … on peut dire qu'il a été purement et simplement criblé de balles, à tous les niveaux

et même en bas des aisselles, ce qui montre certainement qu'il avait levé les bras. Il y en avait

près d'une dizaine, la poitrine, les jambes, un peu partout. »

Plusieurs personnes ont été inculpées comme le précise en entrevue Me Bénéwendé

Sankara : « Pour le moment, des militaires de l'ex-RSP sont inculpés, et aussi le médecin

inculpé pour faux en écriture publique, je crois qu'on voit déjà se profiler à l'horizon une

instruction sereine, sérieuse, où les droits de la défense sont garantis et tout ce que nous

souhaitons, c'est que le juge ait cette sérénité jusqu'au bout pour faire son travail, et qu'on

puisse aboutir à la manifestation de la vérité ». Pour plus de détail :

http://www.bbc.com/afrique/region/2015/10/151014_burkina_inductees

Après vingt années d’harassantes procédures, judiciaires, la CIJS se réjouit qu’enfin une

enquête rigoureuse ait été entamée en mars dernier et qu’un début de procès s’annonce.

L’expertise d’ADN ne saurait tarder et notre équipe a les moyens de la faire corroborer. Les

parties ont quinze (15) jours pour les observations ou les demandes de contre-expertises

du rapport d’autopsie préliminaire, s’il y a lieu.

Les familles des victimes et plusieurs protagonistes de cette affaire ont déjà été entendus.

Le Général Diendéré a été arrêté et inculpé « d'attentat à la sûreté de l'Etat » et de « haute

trahison » suite à sa tentative de coup d’état du 17 mars dernier ayant fait plusieurs morts.

Il est, avec l’ex-président Compaoré, en fuite en Côte d’Ivoire, l’un des deux principaux

suspects dans l’assassinat du président Sankara. Le médecin commandant Halidou Diébré,

auteur du certificat de décès de Sankara arguant qu’il serait décédé de mort naturelle, a été

également mis en examen pour « faux en écriture publique ». Certains des membres du

Régiment de sécurité présidentielle (RSP) dissout ont été aussi arrêtés et d’autres, en fuite,

sont recherchés.

À l’occasion de cette 28ème commémoration, nous joignons nos voix aux forces

progressistes burkinabè et encourageons les responsables de la transition, le tribunal

militaire et la magistrature à :

- assurer l’indépendance de la justice et la laisser poursuivre tous les dossiers

pendants, car l’impunité doit cesser

- interdire de voyage et geler les avoirs de toute personne ayant contribué aux

massacres du 15 octobre 1987, d’octobre 2014 et d’octobre 2015

- enquêter sur le patrimoine de tous les acteurs ayant entravé la justice dans l’affaire

Sankara durant les 20 dernières années.

- demander l’accès aux archives des États-Unis, la France, la Côte d’Ivoire et le Togo et

la coopération de ces pays à l’enquête.

- poursuivre la révision des codes miniers signés par le régime Compaoré, les

programmes de coopération internationale de développement ainsi que leur volet

militaire et sécuritaire

- poursuivre la refonte de l’armée nationale restructurée en profondeur et rectifier sa

posture néocoloniale.

La CIJS félicite la jeunesse et le peuple burkinabé pour son courage et son engagement

contre l’autocratie et l’impunité et lui demande de maintenir la pression et son soutien

à nos avocats et aux familles des victimes. La CIJS recommande aussi, dans cette

période électorale, de veiller à ce que les partis politiques progressistes s’engagent à

concrétiser les aspirations populaires que s’est évertué de traduire en actes le

président Sankara dans son intermède révolutionnaire.

Dans son message annuel de commémoration, la veuve du président Sankara, Mariam

Serme Sankara a déclaré : « Nous osons croire que la justice sera rendue à Sankara et à

toutes les victimes de Compaoré. Nous ne devons pas oublier que sans notre

détermination rien ne sera possible. Pour terminer, j’en appelle encore à l’insurrection

électorale pour un vrai changement !».

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