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25 Mai 2010, Journée de la libération de l´Afrique: Appel aux peuples d´Afrique
25 Mai 2010, Journée de la libération de l´Afrique: Appel aux peuples d´Afrique
25 Mai 2010, Journée de la libération de l'Afrique: Appel aux peuples d'Afrique

Plus d'une dizaine de formations sociales africaines célèbrent cette année leur cinquantième anniversaire d'indépendance, ce qui donne à ce 25 mai 2010, journée de la libération de l'Afrique, une symbolique particulière. La décolonisation même négociée et la chute de l'apartheid ont été globalement positives, même si nous devons demeurer critiques de nos dirigeants qui portent une lourde responsabilité dans les échecs du développement principalement imputables au néo-colonialisme et à l'impérialisme. En ces débuts de 21 ème siècle, l'Union africaine, malgré des avancées notables, peine à concrétiser ses engagements, tout comme les aspirations des fondateurs et partisans du panafricanisme. Le panafricanisme est à la croisée des chemins. Il gagnerait à être infléchi vers au moins deux impératifs. La reconstitution de son africanité et un renouveau progressiste visant un projet de société équilibré.
Cette reconstitution permettrait non seulement une critique de l'africanisme occidentalocentrique, de l'afrocentrisme culturaliste, mais induirait une relecture sans narcisssisme et surtout objective et historique de l'Afrique et son apport à l'avènement du système monde. Ceci passe par la reconnaissance universelle de l'origine monocentrique de l'humanité qui annhile toute forme de racisme et d'eugénisme; par le rétablissement de l'antériorité de civilisations négro-africaines de l'antiquité et de la contribution de celles-ci , comme des celles des périodes traditionnelles subséquentes à l'édification des systèmes monde. C'est aussi la réhabilitation de comment l'Afrique a servi la périphérie de l'Europe, c'est à dire les Amériques, avant de devenir elle même la périphérie du capitalisme. Cette condition la maintient encore dans cette injuste et désuète division internationale du travail, laquelle se perpétue désormais aussi avec des dynamiques endogènes.

La nécessité du renouveau passe par la lutte contre l'amnésie quasi collective des ces apports en Afrique même et en diaspora, mais surtout par le sursaut nécessaire tirant les leçons des luttes anti-impérialistes et de décolonisation; des indépendances négociées et des luttes de liberation nationale et surtout de l'échec du panafricanisme institutionaliste. On saisit alors mieux le caractère toujours inachevé de la liberation totale de l'Afrique et de ses diasporas. Cet effort suppose une repolitisation démocratique de nos masses, une réorganisation des forces du changement, un immense effort de stratégies et d'unité, mais aussi le sens de l'introspection du respect de soi et des autres.
J'enjoins les membres du GRILA et tous les progressistes du continent et de la diaspora de s'unir pour formuler un projet de société continental et alternatif. Il est intolérable que l'Union africaine n'ait toujours pas un plan de développement continental et poursuive encore la perspective du NEPAD, plan de partenariat subalterne non régulé avec l'Occident qui, en plus de n'être qu'une impasse, cache le véritable dessein de l'impérialisme, soit une Afrique des matières premières sans les Africain-E-s.

Pour notre part, nous suggérons l'alternative du panafricentrage. Le panafricentrage, -titre de notre ouvrage à paraître prochainement- se propose d'être une doctrine progressiste puisant dans une démarche afrocentrée dénuée de culturalisme et de narcissisme réactif. Le panafricentrage prône l'inspiration de maa't (au sens d'équilibre cosmique terrestre et personnel et la justice sociale) et un progrés autocentré panafricain internationaliste non sexiste et écologique. Un nouvel "Maa'térialisme historique"! Il incombe aux masses laborieuses et aux intellectuels organiques de l'Afrique et de la diaspora de forger cette alternative contre les phases prédatrices de mondialisation qui profitant de notre vulnérabilité surexploitent nos ressources, et n'autorisent que des options compradores et leurs chimériques intégrations continentales. Il nous faut mieux endurer et contrer l'oppression en multipliant des milliers de réseaux et ramifications. Le panafricentrage c'est le processus de conscience politique et historique d'autonomie collective continentale favorisant, par une rupture selective avec le capitalisme dominant, la maîtrise de l'accumulation, son equitable redistribution et un renouveau socio-culturel. La réappropriation par les masses laborieuses et nos intelligentsia progressistes d'une marge d'action de nos États, fragilisés par les décennies d'ajustement structurel et de prétendue bonne gouvernance, est impérative. Il faut agir vite pour mettre en oeuvre un autre développementisme équilibré, prioritairement tourné vers les besoins essentiels et les infrastructures du continent et de ses diasporas. Il nous faut nous industrialiser à notre rythme et besoins de marché intérieur, en tirant les leçons écologiques de ce qu'il ne faut pas faire et en privilégiant certains des pays émergents. Cette stratégie s'articule sur une dynamique internationaliste restaurant et revigorant la tricontinentale. (voir nos contributions à ce sujet). Il faut préserver nos ressources naturelles de plus en plus bradées, si ce n'est pillées par des intérêts de plus en plus sophistiqués et imbriqués dans nos tissus sociaux désormais gangrénées par des groupes prédateurs. Il faut cultiver le sens de solidarité ,panafricain au niveau des masses et des élites, redéployer les forces de gouvernement au profit des femmes et de la jeunesse en réduisant les prérogatives des États au profit d'une grande confédération continentale.
La lutte continue