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NEPAD - Critique annotee -- Part 4 -- Initiative pour la gouvernance économique et la gouvernance des entreprises
NEPAD - Critique annotee -- Part 4 -- Initiative pour la gouvernance économique et la gouvernance des entreprises
A 2 Initiative pour la gouvernance économique et la gouvernance des entreprises

86 Le renforcement des capacités de l'Etat est un aspect crucial de la création d'un environnement propice au développement. L'Etat a un rôle important à jouer dans la promotion de la croissance et d'un développement durable et dans la mise en oeuvre des programmes de réduction de la pauvreté. Toutefois, la réalité est que de nombreux gouvernements ne sont pas en mesure de jouer un tel rôle. En conséquence, un bon nombre de pays ne disposent pas des cadres d'orientation et de réglementation nécessaires pour une croissance axée sur le secteur privé. Il ne disposent pas non plus de la capacité à mettre en oeuvre les programmes, même lorsque les ressources financières requises sont disponibles.

Ce renforcement des capacités institutionnelles donne l'impression, au départ, de consolider le rôle de l'Etat. En fait, il ne correspond qu'à un rôle mineur d'organisation de l'espace à être investi par la sphère privée sur laquelle s'articule le développement attendu. On signifie explicitement, plus loin dans l'argumentation, que cette croissance émanera en fait du secteur privé et non de l'Etat qui se borne à jouer un rôle pour permettre l'environnement adéquat. Il s'agit ici d'un des plus explicite aveu de l'adhésion au libéralisme, voir au néo libéralisme. La fonction de l'Etat minimum se borne à y stimuler la croissance qui autoriserait le développement.

87 renforcement du rôle ciblé des capacités. Programmes dans tous tous les domaines précédées par une évaluation des capacités en place et fourniture d'un appui approprié..

Si l'on se fie au délai imparti au point 82, la période semble un peu courte pour procéder à une évaluation des capacités existantes. Qui fournira l'appui approprié? Une des conséquences des ajustements la chute des dépenses publiques, surtout celles de fonctionnement et d'investissement peut amener à se poser la question de savoir d'où sera fourni cet appui?

88 Objectif
Promouvoir des programmes concrets, échéancier, améliorer gestion économiques et finances publiques et gouvernance des entreprises dans tous les pays participants.

Ambitieux programme d'évaluation du secteur économico-financier autant publique que privé pour tout un continent. De bonnes institutions, un leadership transparent et de bonnes politiques ne dependent pas seulement de réformes, mais de la prise en compte des lourdeurs des institutions importées et transplantées versus des pratiques syncrétiques du politique d'une part. De la nature de classe de l'Etat d'autre part. La déconnexion ou l'imbrication entre institutions formelles et informelles, au sein des secteurs privés et publics, doivent être pris en compte par les programmes. Ces derniers ne doivent pas privilégier la sphère privée, mais l'ensemble des dynamiques susceptibles de favoriser le développement. Les transformations apportées visant la séparation de l'Etat et de l'économie, voire de toute sphère productive aiguisent les contradictions au sein du bloc au pouvoir, générant une crise politique qui destabilise la fonction organisatrice et gestionnaire escomptée de l'Etat.

89 Actions
- Une équipe spéciale des ministères des finances sera chargée d'examiner les pratiques de gouvernance économique et de gouvernance des entreprises dans les différents pays et régions. Au bout de six mois cette quipe devra soumettre à l'examen du comité des chefs d'Etat chargé de la mise en oeuvre des recommandations sur les normes et les codes de bonne pratique appropriés.
- Le comité des chefs d'Etat chargé de la mise en oeuvre soumettra ses recommandations aux Etats africains pour qu'il les mettent en application.


Comme dit en réponse au point 87, on semble sous estimer l'ampleur de la tâche, à moins que les normes et finalités soient déja prédéterminées, à l'instar des mesures de governance des ajustements structurels.

-Le comité des chefs d'Etat chargé de la mise en oeuvre accordera un rand élevé de priorité à la gestion des finances publiques. Les pays mettront en place un programme visant à améliorer la gestion des finances publiques, fixeront des objectifs et conviendront des mécanismes de suivi.
-Le comité des chefs d'Etat chargé del a mise oeuvre mobilisera des ressources pour consolider les capacités afin de permettre à tous les pays de respecter les normes minimales et les codes de bonne pratique convenus mutuellement

Depuis près de 20 ans, la plupart des finances publiques sont sensées avoir été assainies par de profondes transformations institutionnelles. L'Etat n'en reste pas moins structurellement rentier, sa privatision occasionnant l'irruption du capital étranger dont la reproduction sélective, au sein de certaines formation sociales, favorise des régions au détriment d'autres. On peut donc questionner la marge de manoeuvre d'un tel comité, l'origine de ses ressources et les critères de leur allocation.. Il est fort probable qu'il se cantonnera à imposer les droits de propriété, à s'assurer du cadre juridique garant des contrats extérieurs et d'une governance surtout préoccupée de lever toute entrave au secteur privé local.

Approche sous-régionales et régionales au développement

90 La plupart des pays sont petits en terme de population comme de revenus par habitant. Leurs marchés étant restreints, ils n'offrent pas de perspectives intéressantes de rendement aux investisseurs potentiels, tandis que la diversification de la production et des exportations y est retardée. Les possibilités d'investissements consacrées aux infrastructures essentielles y sont donc limitées.

Certes la taille des pays et de certains marchés sont à blamer. Mais les ajustements structurels n'ont fait qu'aggraver les capacités productives pour des marchés intérieurs tout en érodant les pouvoir d'achat des habitants. On voit bien dans cette formulation, que les tenants du NEPAD renoncent aux projets panafricanistes d'une autonomie collective régionale et continentale se protégeant des nuisances du marché mondial. L'avènement d'un marché intérieur régional de biens de consommation de masse, répondant aux besoins essentielles des populations, est abandonné au profit d'une hypothétique reconversion à la compétitivité pour le marché mondial. On sait que les capitaux extérieurs, en quête de profis au risque limité, n'ont aucun intérêt à investir dans des infrastructures à rentabilité secondaire ou quasi inexistante.
La taille des marchés et des pays restreints peut être compensées par des formes de péréquation, de répartition des tâches de spécialisation et de complémentarité.

91 Cette conjoncture économique montre que les pays africains ont besoin de mettre leurs ressources en commun et de favoriser la coopération et l'intégration économique régionale pour favoriser leur compétitivité sur le plan international. Il faut consolider les 5 regroupements régionaux.

Une fois de plus ce qui semble importer pour le NOPADA-NEPAD n'est pas la consolidation et la coopération régionale mais la seule perspective de compétitivité dans le marché mondial. La mise en commun s'impose certes, assortie de péréquation pour les plus faibles. Mais plus important encore, serait le développement d'une économie intérieure collective, sélectivement déconnectée et protégé. Ce n'est que lorsque sera fournie une telle satisfaction de biens socio-économique que l'on peut prétendre s'insérer dans une meilleure position et concurrencer les autres ensembles à l'échelle mondiale.

92 Le NOPADA met l'accent sur la prestation des services publiques régionaux (transport, énergie, eau, informatique et télématique, éradication des malades, protection de l'environnement et mise en place des capacités régionales de recherche) et sur la promotion du commerce et des investissements intraafricains. Rationnaliser le cadre institutionnel de l'intégration économique avec des projets communs compatibles avec les programmes intégrés de développement nationaux et régionaux et l' harmonisation des économie d'investissement. Coordination ds politiques sectorielles nationales et suivi des décisions régionales.

Ce volet aurait été formidable pour l'intégration régionale n'eut été le bradage et l'abandon en cours de toutes ces sphères stratégiques au capital étranger, à la faveur de la privatisation de l'Etat et l'érosion des souverainetés nationales. La mise sous tutelle des secteurs stratégiques essentiels, non seulement renchérit le coût de consommation, ce qui nuit aux plus pauvres, mais augure d'une phagocytose régionale. L'eau , l'électricité, les routes et ponts à péages, les secteurs de communication et la recherche., dans un tel scénario ne peuvent profiter à des investissements intraafricains, mais plutôt aux transnationales dont les priorités ne sont nullement la satisfaction des besoins essentiels des populations et la fin des dépendances économiques de nos régions. Rationnaliser le cadre institutionnel dans une telle optique demeure un exercice de sophistication des superstructures. Il produirait probablement des coquilles vides, incapable sd'assurer leur fonction de remédier aux problèmse de production , de consommation et leur équitable redistribution aux populations à l'échelle régionale.

93. Le NOPADA donnera la priorité à la consolidation des capacités pour améliorer l'efficacité des structures régionales existantes et rationaliser les organisations régionales existantes. La
Banque africaine de développement doit jouer un rôle de pointe dans le financement des études, programmes et projets régionaux.

On aura saisi à cette étape çi que pour le NOPADA le renforcement institutionnel est le véhicule de transformation adéquat. C'est peut être exagéré. Car trop souvent, nos institutions sont peu opérationnelles par manque de volonté politique, de dépendance vis à vis l'extérieur, de manque de moyens, et d'une insuffisance de méthode et de sensibilité aux besoins réels de nos populations . Il peut paraître dès lors surprenant de confier une tâche de financement de leur rationnalisation à la BAD. Cette institution qui a souffert de certaines de ces mêmes lacunes, et qui est l'écho local du consensus de Washington ne risque -t-elle pas de ne choisir de financer que des études et des programmes qui confortent ses propres travers?

94. Les secteurs couverts par le plan actuel et considérés comme des domaines prioritaires sont les suivants:
i) Infrastructures ;
ii) Ressources humaines, y compris l'éducation, le développement des compétences et l'inversion de la
tendance à la fuite des cerveaux ;
iii) Santé ;
iv) Technologies de l'information et de la communication ;
v) Agriculture ;
vi) Energie ;
vii) Accès des exportations africaines aux marchés des pays développés.

Ces secteurs sont certes essentiels mais ne sont pas exclusifs. Leur choix n'est pas accidentel. Il s'agit des sphères dont on escompte un impact plus rapide en terme de perspective d'insertion et de rentabilité à l'échelle mondiale. L'industrie à ce titre n'est pas mentionnée car elle ne pourrait se qualifier. L'emphase sur les ressources humaines et la santé renvoit principalement à la rentabilisation des forces productives. Il s'agit d'ajuster les forces productives de la société avec les rapports de production existants, et donc du niveau de développement des moyens de travail souhaité.L'énergie, l'accès des exportations et les infrastructures sont des pôles de seduction et de capture du capital international.

95. Toutefois, pour chaque secteur, l'objectif est de combler l'écart actuel entre l'Afrique et les pays développés afin d'améliorer la compétitivité du continent et de permettre à l'Afrique de participer aux processus de mondialisation. La situation particulière des Etats insulaires et sans littoral d'Afrique devra être prise en compte dans ce contexte.

On répéte encore ici le chimèrique rattrapage dans le rythme actuel de la mondialisation, sans réaliser le fait que seule une portion infime de l'économie continentale y parviendra dans le meilleur des scénari. L'essentielle de la population qui ne pourra suivre cette marche forcée sera fragilisée et davantage dépréciée. Ce n'est donc pas que les zones enclavées qui doivent retenir l'attention, mais toutes les populations qui risquent de pâtir de cette frénésie compétitive dans la mondialisation prédatrice et dont le destin sera synonyme de condition infrahumaine.